Interview de la secrétaire du comité d’entreprise de Galderma France sur la politique ASC choisie par ce comité
Interview de Fadia Bouchane
Secrétaire du comité d’entreprise de Galderma France, sur la politique ASC choisie et mise en œuvre par les élus de ce comité
Quelques précisions préalables :
Galderma France est un laboratoire de l’industrie pharmaceutique spécialisé dans la dermatologie et basée à la Défense. Il appartient au groupe Nestlé.
La maison mère Galderma se trouve à Lausanne. Il y a aussi un centre de recherche à Sophia antipolis avec 600 personnes (filiale de Galderma) et une usine à Albi (également filiale) qui emploie environ 300 salariés.
Pour l’instant, il n’y a pas d’UES ni d’ASC commune entre les trois structures.
Le taux de contribution de l’employeur aux ASC est égal à 0,75%.
Le montant du budget ASC du CE de Galderma France est de 162 K€.
Il y a environ 280 ouvrants droits dont 60 itinérants (visiteurs médicaux).
Quelles sont les grandes masses du budget ?
Fadia Bouchane : Lorsque nous sommes arrivés au CE, le budget était plus important parce qu’il y avait quelques gros salaires, mais les ASC se limitaient (en gros) à une soirée pour le site de la Défense (à 50 ou 60 000 euros) ; un WE de ski pour 15 personnes (le CE et quelques personnes proches des élus de l’époque) ; une bouteille de champagne pour tous les collaborateurs et la billetterie.
La nouvelle équipe d’élus a décidé de changer cette façon de penser les ASC.
Elle a instauré les chèques vacances qui représentent la plus grosse ligne budgétaire, puisque cette ASC constitue 38% de l’ensemble du budget.
Le deuxième poste après les chèques vacances, c’est le noël adulte (30%). On donne des chèques cadeaux et on organise une petite fête. Au début on passait par une agence, mais cela nous coûtait cher et la prestation n’était pas la même, donc désormais, nous organisons nous mêmes la soirée.
Est-ce que cette soirée est fréquentée ?
Fadia Bouchane : Sur 160 personnes concernées (les itinérants ne le sont pas), 110 salariés y participent, ce qui est une bonne fréquentation.
C’est une soirée déguisement. Avant, avec la précédente équipe, c’était des diners assis par service.
J’ai essayé de changer la date pour que cette soirée rassemble tout le personnel, mais la direction n’a pas voulu au prétexte que la réunion était une réunion de travail.
On organise aussi une autre soirée en province (cette année c’est à Bordeaux) où tout le monde peut venir.
Les autres postes ?
Fadia Bouchane : Le troisième poste (13%), c’est le noël enfant. Nous distribuons des livres et on organise un cirque.
On a aussi une subvention sport qui se monte à 80 euros/an pour chaque collaborateur (3,7% du budget).
On a également un système de billetterie (8,7%) tous les 2 ou 3 mois avec des chèques cinéma, des CD, des livres et des chèques culture, ces derniers étant peu appréciés.
Est-ce que pour la billetterie le CE passe par une plate forme ou gère t’il cela en interne ?
Fadia Bouchane : Les salariés passent par le CE pour prendre leurs chèques. On en achète un stock. On nous a proposé récemment de passer par un site, mais nous préférons gérer cela en interne.
Est-ce que cela vous prend beaucoup de temps de gérer la billetterie ?
Fadia Bouchane : Avant que le nouveau CE soit élu, pratiquement toutes les heures de délégation étaient consacrées à cette gestion. Les anciens élus limitaient leur mandat à la gestion des ASC. La dimension politique du CE n’existait pas.
Avec les nouveaux élus qui sont plus des personnes de terrain avec un caractère plus revendicatif, le CE a changé.
En conséquence et depuis peu, le CE a engagé une personne qui vient dans l’entreprise un jour par semaine pour s’occuper de la billetterie. C’est une solution qui représente un coût, mais les nouveaux élus préfèrent se consacrer au rôle économique du CE.
On donne également des chèques naissance (1%) : 100 euros par enfant (18 naissances l’an dernier).
Fadia Bouchane : Nous subventionnons aussi des sorties culturelles (1,3%). Avant il y en avait beaucoup, mais aujourd’hui, plus personnes ne s’en occupe, c’est dommage, car on subventionnait toutes les belles expositions du Louvre ou d’autres musées. Mais ce n’était pas très équitable pour les salariés qui ne sont pas sur Paris. Ces derniers avaient une subvention particulière pour éventuellement profiter des expositions locales, mais cela n’a pas fonctionné. Nous sommes donc en train de revoir cela.
Enfin, à un moment, nous avons aussi subventionné des courses (Handicap international, la Parisienne, …).
Pour autant, une gestion des ASC permettant aux salariés éloignés du centre de l’entreprise de profiter de la vie culturelle de leur région nous semble une bonne chose ? Une politique du livre avec le libraire par exemple.
Fadia Bouchane : Avec les libraires, c’est ce que nous faisons. Nous ne passons plus par Amazone par ex.
Mais par rapport aux 60 personnes dispersées ?
Fadia Bouchane : Nous leur envoyons les livres sélectionnés.
Nous procédons ainsi pour le Noël enfants. On achète une sélection de livres, nous les faisons lire par nos enfants ou nos proches, puis on en retient un certain nombre.
C’est une ASC qui demande beaucoup de temps, mais que les salariés apprécient beaucoup, notamment par rapport à ce qui était fait auparavant. Le CE leur offre de beaux livres avec lesquels on a du plaisir à tourner les pages. Pas de BD, pas de séries. Des livres de lectures que les enfants lisent avec leurs parents.
J’avais même pensé l’année précédente de remplacer la bouteille de champagne par une ASC plus culturelle.
Les CE ne sont pas là pour distribuer du champagne aux salariés !
Fadia Bouchane : C’est vrai, mais les salariés n’y étaient pas favorables. Ils sont habitués à leur champagne depuis longtemps. Mais je ne désespère pas de faire évoluer les mentalités.
Vous fréquentez les salons des CE ?
Fadia Bouchane : Non. On devrait ?
Pas du tout, on voit trop de CE aller justement dans ces salons pour acheter champagne, foies gras etc. Et se faire « alpaguer » par des commerciaux pour leur faire acheter ce type de produits.
Fadia Bouchane : Pour beaucoup de CE, c’est la facilité. Nous n’avons pas retenu cette façon de gérer nos ASC.
Pour la billetterie, comment cela se passe concrètement ?
Fadia Bouchane : Les salariés passent prendre leurs chèques cinéma ou autres, chaque trimestre. Ils ont droit par trimestre à 12 tickets (ce sont les chèques cinéma les plus appréciés et de loin).
Chaque salarié choisit dans la limite de 12 billets, des billets cinéma ou/et des chèques lire par ex.
La billetterie est une ASC qui explose dès que la trésorière la met en ligne. Cela démontre que les salariés apprécient cette ASC.
Chaque salarié a donc droit à 12 x 5 euros par trimestre, le CE subventionnant à hauteur de 5 euros.
Il n’y a donc pas de prise en compte du pouvoir d’achat des différents salariés. Pourquoi ne pas avoir appliqué pour cette ASC un système du type quotient familial pour faciliter l’accès à la culture aux plus démunis ?
Fadia Bouchane : On a toujours fonctionné comme cela. L’assistante comme le DG ont droit à la même subvention.
C’est leur argent. Il faut à notre avis se laisser de la latitude. On n’a pas voulu remettre en cause cette façon de faire et de penser à laquelle les salariés de l’entreprise sont habitués. Et puis le budget étant calculé sur une masse salariale, chaque salarié y contribue en fonction de son salaire. Le DG y contribue donc plus.
En tout état de cause, cette gestion en directe vous permet d’entretenir un contact avec vos ayants-droits !
Fadia Bouchane : Oui, tout à fait. On nous a proposé à un moment de sous-traiter cette activité (voir plus haut). Mais on préfère gérer celle-ci nous mêmes, pour justement avoir cette proximité avec les salariés.
Quelles sont les ASC les plus appréciées par catégorie de personnel ?
Fadia Bouchane : Elles sont toutes appréciées indistinctement.
Quand vous dites que les ASC, c’est l’argent des salariés, nous ne sommes pas tout à fait d’accord avec vous. En effet, pour nous les ASC, c’est avant tout des activités organisées par les élus. Sinon, quelles différences avec le salaire payé par l’employeur en contrepartie de la prestation de travail du salarié ?
Fadia Bouchane : Quand on dit que c’est leur argent, on se réfère au mode de calcul du budget ASC, à savoir un taux multiplié par une masse salariale.
C’est pour cela que nous estimons qu’il devrait y avoir d’autres paramètres de calcul du budget ASC que les salaires (le CA notamment). Cela permettrait d’éviter l’association ambiguë : salaire/ASC.
Une autre question : imaginons que sur le site de la défense, les ASC de toutes les entreprises soient mutualisées. Et qu’il soit proposé aux CE des ASC plus diversifiées et plus nombreuses du fait de la démultiplication des moyens permis par la mutualisation. Seriez-vous intéressés par ce que l’on pourrait appeler un CE de site d’ASC, sachant que les gestionnaires de cette mutualisation seraient des élus des entreprises adhérentes ?
Fadia Bouchane : A mon avis, cela risque de compliquer les décisions en matière d’ASC, car c’est un système qui multiplie le nombre de décideurs. La gestion du temps de présence serait également plus compliquée.
Et puis pour nous, gérer en direct les ASC, c’est une manière de ramener les salariés vers nous.
Avant que la nouvelle équipe ne soit élue, les salariés de l’entreprise ne savaient pas ce qu’était un vrai CE. Aujourd’hui, ils lisent les PV du CE. Les ASC, c’est également pour nous un moyen de maintenir le contact avec les salariés. Six ans après notre élection, il y a des gens qui nous suivent et qui commencent à s’intéresser à la vie économique de l’entreprise.
Toutefois, nous avions pensé, quand nous avons été rachetés par Nestlé, à nous rapprocher de son CE.
J’avais ainsi proposé au CE de Nestlé de nous greffer à eux pour avoir un pouvoir d’achat plus important, sans pour autant mutualiser les ASC. Mais cela ne s’est pas réalisé.
Notre crainte, c’est aussi de perdre la main sur le choix de nos ASC et surtout le contact avec les salariés.